Bruno Le Maire dans les starting blocks
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Bruno Le Maire dans les starting blocks
23.02.2016
Novice en politique, le député de l’Eure compte de nombreux soutiens. Il annonce sa candidature ce mardi.
Au théâtre de la primaire LR, Bruno Le Maire dans le rôle de l’émancipé
Il est prêt. Ce mardi soir, à Vesoul (Haute-Saône), Bruno Le Maire se déclarera officiellement candidat à l’élection primaire qui désignera, le 27 novembre, le candidat de la droite à l’élection présidentielle. Revendiquant une ambition décomplexée, il raconte son émancipation dans un livre - encore un - à paraître jeudi (Ne vous résignez pas !, Albin Michel).
Fils de la grande bourgeoisie traditionnelle, il assure que l’Ecole normale supérieure et la littérature lui ont permis, très jeune, de se «libérer» de ses origines. La politique a fait le reste en «l’arrachant» à son milieu. «Je n’appartiens à aucun cercle. Ma vie consiste à échapper à ces enfermements», confie-t-il au Point cette semaine. Emancipé, Le Maire prétend aussi l’être de sa famille politique, qui aurait copié «le vocabulaire du socialisme», contribuant ainsi à la survie d’un «modèle social» responsable, selon lui, du «déclassement français».
Terrain.
Il affrontera donc Alain Juppé, François Fillon et probablement Nicolas Sarkozy, ainsi qu’une poignée de «petits» candidats qui espèrent, grâce à un score honorable, se placer pour l’après-2017. Le Maire, lui, ne veut jouer que dans la cour des grands. «Je peux gagner, je vais gagner», explique-t-il à qui veut l’entendre. Président de la République ? Mais oui, il s’y voit. Et qu’on n’aille pas lui dire qu’il serait trop jeune pour le job. Il aura 48 ans en 2017, comme Giscard en 1974, plus que David Cameron ou Matteo Renzi quand ils sont arrivés au pouvoir. Face aux Juppé, Fillon, Sarkozy, concurrents qui cumulent à eux trois cent vingt ans de vie politique, il a pu préempter le slogan simpliste mais efficace du «renouveau».
Il est vrai qu’en politique, Le Maire est un bleu. Il ne s’est lancé qu’en 2007, à 37 ans. A cet âge, la plupart des responsables politiques de sa génération avaient déjà une bonne décennie d’heures de vol. Pour rattraper ce retard, il laboure le terrain à un rythme effréné. Méthodiquement, il aura visité et revisité depuis 2012 tous les départements, toutes les fédérations UMP, tous les métiers et les corporations.
Réseau.
La primaire de 2016 ? Il s’y voit depuis que la guerre Copé-Fillon a mis au jour l’impossible émergence d’un leader naturel après la défaite de Sarkozy. En juin 2013, il était déjà à Vesoul devant plusieurs centaines d’orphelins du sarkozysme rassemblés par le député Alain Chrétien, lemairiste de la première heure. «Vous avez devant vous un futur président de la République», avait osé ce dernier, introduisant son invité. Le Maire avait protesté. Mollement : «Ce n’est pas le sujet. J’essaie de construire quelque chose de cohérent. Nous verrons bien, le moment venu, si les Français y sont sensibles.» Pour construire, il ne s’entoure pas seulement de jeunes loups ambitieux. Il embarque aussi le rugueux Jérôme Grand d’Esnon, de la Ville de Paris, formé à l’école Chirac. Homme clé du dispositif Le Maire, cet homme-là n’a rien d’un poète…
A la faveur des élections municipales de mars 2014, l’ex-ministre de l’Agriculture s’est forgé un solide réseau de jeunes élus qui le voient déjà à l’Elysée. Il est allé faire son marché partout, notamment dans la capitale, où il s’est assuré le soutien des seules nouvelles têtes de la droite, les maires des Ve et IXe arrondissement, Florence Berthout et Delphine Bürkli.
Attitude.
«Bruno Le Maire ? C’est un homme qui se prépare», résume le metteur en scène Alain Sachs. Les deux hommes se sont rencontrés l’été dernier au Festival d’Avignon. Ce jour-là, ses pérégrinations l’ont conduit à la rencontre d’artistes. Ils étaient une petite dizaine à déjeuner, hommes et femmes de théâtre, autour de l’ex-ministre, par ailleurs agrégé de lettres et excellent connaisseur du dramaturge Thomas Bernhard. L’échange a été si plaisant qu’un comédien a lâché à la fin du repas : «Vous êtes beaucoup plus sympa qu’à la télévision.» Le Maire : «Je sais, c’est un peu mon problème.» Un convive lui suggérait alors, sur le ton de la plaisanterie, de «demander de l’aide» au metteur en scène assis à ses côtés. Le Maire a pris cela très au sérieux.
Relancé quelques jours plus tard, Alain Sachs s’est laissé tenter par celui qui avait eu le culot de disputer à Sarkozy la présidence de l’UMP, après avoir été l’un des rares à ne pas marcher derrière la Manif pour tous. Homme de gauche, le metteur en scène précise qu’il ne s’agit pas de coaching, ni de cours de théâtre. Non pas «fabriquer un personnage en reniant ce qu’il est vraiment», mais plutôt permettre au candidat de «se montrer tel qu’il est». L’homme de théâtre y trouve son compte : «Ce n’est pas tous jours qu’on rencontre un type qui veut devenir président de la République», confie-t-il. Du Shakespeare, pour de vrai.
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