Premiers jours de détention pour le rappeur tunisien Weld El 15
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Premiers jours de détention pour le rappeur tunisien Weld El 15
16.06.2013
Capture d'écran du clip «Boulicia Kleb» à l'origine de la condamnation du rappeur Weld El 15 à deux ans de prison ferme.
DR
Par RFI
Condamné à deux ans de prison ferme jeudi 13 juin par la justice tunisienne pour le clip de sa chanson Boulicia Kleb, dénonçant les violences policières, le rappeur tunisien Alaa Yaacoub, alias Weld El 15, ne s'alimente plus tandis que ses proches se mobilisent.
Depuis sa cellule provisoire de la prison de Mornaguia (près de Tunis), le rappeur Alaa Yaacoub attend la date de l’audience en appel. « Elle devrait se dérouler d’ici un mois », confie son avocat Me Ghazi Mrabet qui lui a rendu visite en prison vendredi 14 juin après avoir fait appel dans la matinée. M.Yaacoub, connu sous son nom de rappeur Weld El 15, est toujours sous le choc et a refusé tout repas depuis sa condamnation jeudi 13 juin à deux ans de prison par le tribunal de Ben Arous.
De la prison de Mornaguia à Boulicia Kleb
M.Yaacoub avait déjà été condamné en mars dernier par contumace à deux ans de prison ferme après la diffusion sur YouTube du clip de sa chanson intitulée Boulicia Kleb, soit « Les policiers sont des chiens ». Plus d’un million de vues pour un clip au style brut, dans un décor de barres d’immeubles grises et des paroles dénonçant les exactions des forces de l’ordre à l’ère post-Ben Ali. Après trois mois de « cavale », M.Yaacoub a fini par se rendre. Jeudi 13 juin, le jeune homme âgé de 25 ans comparaissait libre devant le tribunal de Ben Arous, en banlieue de Tunis. « J’ai parlé à la police avec son langage. Celui qu’elle utilise avec nous. Je n’ai pu lui répondre qu’avec mes paroles », a-t-il déclaré dans un entretien accordé au site d'information Naawat.
Après une dizaine de minutes de délibération, les juges ont prononcé le verdict : deux ans de prison ferme pour « outrage à la pudeur » et « outrage à un fonctionnaire ». « Le jugement est très sévère à l'égard d'un artiste qui a décidé de se livrer de son propre gré à la justice », a déclaré son avocat Me Ghazi Mrabet. Il est immédiatement transféré à la prison de Mornaguia par la police. C’est depuis cet établissement pénitentiaire qu’il avait écrit les paroles de la chanson Boulicia Kleb en 2012. Il y avait été incarcéré, pendant huit mois, avec plusieurs de ses amis, pour consommation de stupéfiants et en était sorti en octobre 2012.
Violence policière lors d'un procès sous haute tension
A l’annonce du verdict, jeudi 13 juin 2013, sa famille et ses proches présents dans la salle d’audience du tribunal de Ben Arous n’ont pu contenir leurs émotions. Selon plusieurs témoins contactés par rfi.fr, les policiers ont brutalement réprimé leurs indignations et les protestations contre « un jugement écrit à l’avance ». Certains ont été pourchassés et frappés à l’extérieur du tribunal, confient plusieurs sources. Selon l’AFP, un gaz irritant s’est répandu aux alentours du tribunal. La police accuse les amis du rappeur d’en avoir fait usage. « Nous n’avons pas eu recours à la violence et eux ont utilisé la force et des gaz lacrymogènes », précise la blogueuse-activiste Lina Ben Mhenni qui a été « frappée au visage ». Un journaliste du site d’information Nawaat, qui a filmé les dérapages, s’est lui aussi fait « tabasser » et à plusieurs reprises des policiers ont tenté de lui arracher sa caméra. A l’origine d’une tribune parue dans le quotidien français Libération le jour du procès, la journaliste franco-tunisienne Hind Meddeb a été arrêtée puis relâchée quelques heures plus tard, accusée de trouble de l’ordre public et d’outrage à agents. Elle sera jugée en comparution immédiate lundi 17 juin.
Rappeurs et activistes mobilisés au nom de la liberté d'expression
« Si Weld El 15 officialise sa grève de la faim, nous, les rappeurs tunisiens le suivront au nom de la défense de la liberté d’expression. Et nous nous apprêtons, s’il le faut, à nous installer devant le tribunal jour et nuit avec des tentes. Et ce jusqu’à sa libération », a déclaré à rfi.fr le rappeur Madou MC. Agé de 25 ans, il est un ami d'enfance de Weld El 15 avec qui il a commencé à rapper à l'âge de 11 ans dans le groupe « Nouvelle génération hardcore ». MC Madou a aussi été condamné à deux ans de prison car il est crédité à la fin du clip. Puis il a obtenu un non-lieu. « Rien n’a changé, on est muselés et on a perdu l’espoir », constate-t-il avec amertume. Pour Me Ghazi Mrabet, avocat de Weld El 15, entamer une grève de la faim peut être risqué : « Ce choix lui appartient mais je lui ai déconseillé, car en Tunisie ils peuvent le laisser mourir sans réagir ». Pour l’activiste Lina Ben Mhenni, « l’affaire Weld El 15 » est une illustration supplémentaire de l’atteinte à la liberté d’expression : « Il n’y a pas eu de changement ni de transition démocratique. Le message du gouvernement aux jeunes Tunisiens est clair : toute critique du régime vous expose à de la prison ferme ». Depuis son fief d'Oakland en Californie, le rappeur américain Raashan Ahmad, signataire de la pétition parue dans Libération, explique à RFI : « Weld El 15 a mis sa vie et sa liberté en jeu pour le bien de sa communauté. Dans ses textes, il n'aborde pas les stéréotypes des armes, de la drogue, des filles et de l'argent facile mais bel et bien de la réalité et de ce que les jeunes vivent. Je le soutiendrais jusqu'au bout ». Artistes, journalistes et défenseurs des droits de l’homme en Tunisie redoutent un durcissement du gouvernement dirigé par les islamistes, au détriment de la liberté d'expression et de la liberté individuelle.
Capture d'écran du clip «Boulicia Kleb» à l'origine de la condamnation du rappeur Weld El 15 à deux ans de prison ferme.
DR
Par RFI
Condamné à deux ans de prison ferme jeudi 13 juin par la justice tunisienne pour le clip de sa chanson Boulicia Kleb, dénonçant les violences policières, le rappeur tunisien Alaa Yaacoub, alias Weld El 15, ne s'alimente plus tandis que ses proches se mobilisent.
Depuis sa cellule provisoire de la prison de Mornaguia (près de Tunis), le rappeur Alaa Yaacoub attend la date de l’audience en appel. « Elle devrait se dérouler d’ici un mois », confie son avocat Me Ghazi Mrabet qui lui a rendu visite en prison vendredi 14 juin après avoir fait appel dans la matinée. M.Yaacoub, connu sous son nom de rappeur Weld El 15, est toujours sous le choc et a refusé tout repas depuis sa condamnation jeudi 13 juin à deux ans de prison par le tribunal de Ben Arous.
De la prison de Mornaguia à Boulicia Kleb
M.Yaacoub avait déjà été condamné en mars dernier par contumace à deux ans de prison ferme après la diffusion sur YouTube du clip de sa chanson intitulée Boulicia Kleb, soit « Les policiers sont des chiens ». Plus d’un million de vues pour un clip au style brut, dans un décor de barres d’immeubles grises et des paroles dénonçant les exactions des forces de l’ordre à l’ère post-Ben Ali. Après trois mois de « cavale », M.Yaacoub a fini par se rendre. Jeudi 13 juin, le jeune homme âgé de 25 ans comparaissait libre devant le tribunal de Ben Arous, en banlieue de Tunis. « J’ai parlé à la police avec son langage. Celui qu’elle utilise avec nous. Je n’ai pu lui répondre qu’avec mes paroles », a-t-il déclaré dans un entretien accordé au site d'information Naawat.
Après une dizaine de minutes de délibération, les juges ont prononcé le verdict : deux ans de prison ferme pour « outrage à la pudeur » et « outrage à un fonctionnaire ». « Le jugement est très sévère à l'égard d'un artiste qui a décidé de se livrer de son propre gré à la justice », a déclaré son avocat Me Ghazi Mrabet. Il est immédiatement transféré à la prison de Mornaguia par la police. C’est depuis cet établissement pénitentiaire qu’il avait écrit les paroles de la chanson Boulicia Kleb en 2012. Il y avait été incarcéré, pendant huit mois, avec plusieurs de ses amis, pour consommation de stupéfiants et en était sorti en octobre 2012.
Violence policière lors d'un procès sous haute tension
A l’annonce du verdict, jeudi 13 juin 2013, sa famille et ses proches présents dans la salle d’audience du tribunal de Ben Arous n’ont pu contenir leurs émotions. Selon plusieurs témoins contactés par rfi.fr, les policiers ont brutalement réprimé leurs indignations et les protestations contre « un jugement écrit à l’avance ». Certains ont été pourchassés et frappés à l’extérieur du tribunal, confient plusieurs sources. Selon l’AFP, un gaz irritant s’est répandu aux alentours du tribunal. La police accuse les amis du rappeur d’en avoir fait usage. « Nous n’avons pas eu recours à la violence et eux ont utilisé la force et des gaz lacrymogènes », précise la blogueuse-activiste Lina Ben Mhenni qui a été « frappée au visage ». Un journaliste du site d’information Nawaat, qui a filmé les dérapages, s’est lui aussi fait « tabasser » et à plusieurs reprises des policiers ont tenté de lui arracher sa caméra. A l’origine d’une tribune parue dans le quotidien français Libération le jour du procès, la journaliste franco-tunisienne Hind Meddeb a été arrêtée puis relâchée quelques heures plus tard, accusée de trouble de l’ordre public et d’outrage à agents. Elle sera jugée en comparution immédiate lundi 17 juin.
Rappeurs et activistes mobilisés au nom de la liberté d'expression
« Si Weld El 15 officialise sa grève de la faim, nous, les rappeurs tunisiens le suivront au nom de la défense de la liberté d’expression. Et nous nous apprêtons, s’il le faut, à nous installer devant le tribunal jour et nuit avec des tentes. Et ce jusqu’à sa libération », a déclaré à rfi.fr le rappeur Madou MC. Agé de 25 ans, il est un ami d'enfance de Weld El 15 avec qui il a commencé à rapper à l'âge de 11 ans dans le groupe « Nouvelle génération hardcore ». MC Madou a aussi été condamné à deux ans de prison car il est crédité à la fin du clip. Puis il a obtenu un non-lieu. « Rien n’a changé, on est muselés et on a perdu l’espoir », constate-t-il avec amertume. Pour Me Ghazi Mrabet, avocat de Weld El 15, entamer une grève de la faim peut être risqué : « Ce choix lui appartient mais je lui ai déconseillé, car en Tunisie ils peuvent le laisser mourir sans réagir ». Pour l’activiste Lina Ben Mhenni, « l’affaire Weld El 15 » est une illustration supplémentaire de l’atteinte à la liberté d’expression : « Il n’y a pas eu de changement ni de transition démocratique. Le message du gouvernement aux jeunes Tunisiens est clair : toute critique du régime vous expose à de la prison ferme ». Depuis son fief d'Oakland en Californie, le rappeur américain Raashan Ahmad, signataire de la pétition parue dans Libération, explique à RFI : « Weld El 15 a mis sa vie et sa liberté en jeu pour le bien de sa communauté. Dans ses textes, il n'aborde pas les stéréotypes des armes, de la drogue, des filles et de l'argent facile mais bel et bien de la réalité et de ce que les jeunes vivent. Je le soutiendrais jusqu'au bout ». Artistes, journalistes et défenseurs des droits de l’homme en Tunisie redoutent un durcissement du gouvernement dirigé par les islamistes, au détriment de la liberté d'expression et de la liberté individuelle.
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