y a-t-il eu des tentatives de fraude dans les Alpes-Maritimes ?

Après trois heures de queue, ce couple de sexagénaires niçois doit encore patienter. Ils ont tendu aux membres du bureau qui surveillent le scrutin de la 5e circonscription des Alpes-Maritimes deux procurations. Problème : on aurait déjà voté pour ces personnes. Le nom sonne banalement local... Alors, les deux coprésidents, l'un représentant Copé, l'autre Fillon, demandent que l'on vérifie la validité de cette délégation de pouvoir. Un huissier est sollicité. "Refusé."


L'ambiance est tendue. En début d'après-midi, Michèle Tabarot, secrétaire fédérale UMP du 06, sur le ticket de Copé, a assuré que de "fausses procurations" avaient été signalées par son équipe à Nice. Dans les trois bureaux de vote de la capitale azuréenne, situés dans l'hôtel Plaza, un quatre étoiles, aucun signalement officiel n'a été émis. Éric Ciotti, président du conseil général et député des Alpes-Maritimes, directeur de campagne de Fillon, balaye ses accusations.
"Sortie grotesque"

"C'est une sortie grotesque dont elle est coutumière. Cette polémique est lancée pour justifier la défaite à venir", nous lance-t-il alors que les adhérents lui confient leur lassitude devant le temps d'attente. Les trois huissiers, pour leur part, notent tout dans leur P-V. Ils furètent en non-stop entre les trois bureaux. "On a invalidé beaucoup de procurations pour non-conformité. Souvent, les documents n'étaient pas au complet. On nous sollicite beaucoup à ce sujet", nous dit l'un d'entre eux. "Des procurations avec des signatures qui ne correspondent pas, ou sans le nom de la personne déléguant son pouvoir, on en a intercepté plein. On peut assimiler cela à de la tentative de fraude. Il y a tellement de monde qu'on espère juste intercepter tout avant le vote", nous explique un huissier. Le Point.fr a pu consulter certains de ces documents non conformes.

Michèle Tabarot avait précisément déclaré en début d'après-midi que ses équipes présentes à Nice lui avaient signalé "des procurations vierges distribuées à l'intérieur du bureau de vote pendant le déroulement du scrutin" ainsi que de "fausses procurations saisies par l'huissier avec des signatures qui ne correspondaient pas aux pièces d'identité".

Depuis 9 heures et l'ouverture du scrutin, la salle de la baie des Anges de l'hôtel Plaza est bondée. La chaleur y est étouffante. "C'est un succès qui dépasse le noyau dur des militants. Nous, on avait demandé plus de bureaux. C'est l'organisation de Copé. Je crains que certains militants ne se découragent dans la queue et partent", lance Ciotti. Cette affluence inattendue interpelle aussi les huissiers : "On n'est pas assez nombreux."
Contrôle

Les bureaux de vote des Alpes-Maritimes (troisième fédération UMP en nombre d'adhérents avec plus de 15 000 encartés) bénéficient de l'un des dispositifs de contrôle du scrutin les plus étoffés du pays. Dix personnes par bureau surveillent le scrutin ! Les raisons de cette abondance sont multiples. Ici, les deux camps co-organisent les élections. Michèle Tabarot, secrétaire départementale UMP du 06, était désignée par les textes pour accomplir seule cette tâche. Mais, car elle est sur le ticket Copé, Christian Estrosi a été nommé coresponsable du scrutin à ses côtés. Les deux équipes ont décidé lundi après-midi à Nice la présence supplémentaire d'un coprésident et d'un assesseur dans les bureaux. Un huissier complète l'effectif.

Cette dernière présence est le résultat de l'ultime polémique de la campagne. Jean-François Copé avait dégoupillé le premier. Jamais à court de provocations, le député-maire de Meaux avait exprimé ses "craintes" concernant la fraude, dimanche 11 novembre, dans les colonnes du Journal du dimanche : il ciblait même ses "amis niçois" appelés à "être très rigoureux". Éric Ciotti ainsi que Christian Estrosi, député-maire de Nice, lui aussi soutien de l'ex-Premier ministre, ont cru se reconnaître derrière cette expression ; les deux ont immédiatement réagi, suggérant que des huissiers soient dépêchés dans les bureaux de vote pour empêcher toute "irrégularité". La commission électorale de l'UMP a suivi cette proposition vendredi. Des précautions qui n'auront pas permis d'éviter la polémique. Qu'en sera-t-il des irrégularités ?